Grands maîtres de l’attribution du prix de
L’école aujourd’hui, les enfants ont choisi. Voici leurs choix, fruits
de riches réflexions.
Les lauréats
Curieusement, en privilégiant Le Loup des Sables dans la catégorie “roman”, les enfants ont donné raison a posteriori au ministère suédois de l’Éducation, qui offre ce beau livre à tous les enfants de CP, afin qu’il accompagne leurs interrogations au long de leur scolarité primaire. Ce roman “fait rêver”, le personnage du loup est “attachant” et sait répondre aux “questions primordiales” que chaque enfant se pose, tout en les amenant à échanger entre eux. Des enfants ont même confié à leur enseignante qu’ils avaient aussi un “loup des sables”, “confident imaginaire qui apaise et réconforte”. Statistiquement, si Le Loup des Sables est en tête du premier choix, il l’est aussi lorsque l’on cumule les premier et deuxième choix, preuve d’une belle cohérence dans la décision. Les A.U.T.R.E.S., second prix, a devancé de peu Mademoiselle Pif-Paf. Dans des registres très différents, les deux romans s’attachent à l’univers de la classe. Le roman espagnol a permis aux enfants de “reconnaître des situations qu’ils vivent tous les jours”, et de penser que “nous aussi aux yeux d’un autre on peut être différent”. Mademoiselle Pif-Paf a séduit par son humour, et parce que “être amoureux dans une classe, c’est normal”, même si “une fille qui aime les livres à ce point, pour nous, c’est anormal” [sic !].
Le résultat n’est pas aussi tranché avec les albums. Mais qui veut la peau des ours nains ? obtient le premier prix. Il est suivi de peu par L’Invisible, qui emporte le deuxième prix, et du Chat Porte-Bonheur. Le Chat Porte-Bonheur et L’Invisible ont séduit par leurs illustrations, relativement classiques. Le Chat est “plein de couleurs joyeuses” et “nous apprend que le vrai bonheur c’est l’amour et non la violence”. Quant à L’Invisible, son format a beaucoup surpris et les illustrations ont enchanté les enfants qui “aiment les histoires d’Indiens” et qui ont apprécié “l’écho au conte de Cendrillon connu de tous”.
En regardant de plus près les choix selon les cycles, on constate de grandes variations. Par exemple, pour les CM1/CM2, le premier prix serait revenu à La Cabane au fond du chantier, roman exigeant et dur, évoquant les difficultés quotidiennes d’un quartier déshérité et les moyens que les enfants trouvent pour créer des liens. Les enfants “qui ont hâte d’aller au collège se sont facilement identifiés à ces personnages”. Le roman Les A.U.T.R.E.S. a davantage séduit les plus jeunes, mais grâce à lui, tous ont compris que “la révolte est possible”.
Dans le domaine des albums, Mais qui veut la peau des ours nains ? a attiré les enfants du troisième cycle, qui, avec leur passé de lecteurs, sont en mesure de repérer le comique des jeux littéraires. Ils ont aimé “les nombreux clins d’œil à tous les contes qu’ils connaissent et à d’autres qu’[ils ont] découvert en classe” ; ils ont adoré “chercher de quelle histoire était extrait chaque personnage”. Certains ont même développé l’idée d’une lecture qui anticipe, le comique reposant sur le fait que l’anticipation se révèle trompeuse ! Ce comique laisse plus indifférents les jeunes enfants soucieux de la stabilité du récit. Pour les CE1/CE2, il y aurait plutôt eu une difficulté à départager L’Invisible pour ses illustrations, et Le chat Porte-Bonheur “pour sa douceur”.
Une expérience enrichie par le Réseau LEA
L’expérience, que nous menons depuis 2004, est toujours très positive. Cette année, nous avons été très sensibles à la proximité rendue possible par les échanges sur le Réseau LEA. À tous les niveaux la joie fut présente : celle d’attendre les livres, de les découvrir, de les lire, de les commenter, et enfin de les sélectionner. De même les enfants avaient le sentiment de participer à un acte collectif où comptait la voix de chacun.
Si toutes les classes, du CP au CM2, ont eu accès à l’ensemble des livres, romans et albums, il est certain que la tâche s’est révélée difficile pour les CP et quelques CE1 à l’égard des romans, et n’a pu être menée que grâce au dévouement des enseignants. Qu’ils en soient remerciés.
Remercions également les éditeurs qui ont accepté de prêter leur concours à cette action, riche d’enseignements : la lecture ainsi partagée instaurait une belle dynamique à l’intérieur des classes, et dans les échanges entre elles. Les enfants aiment lire, et veulent lire, quand ils disposent de bons livres et qu’ils apprécient le sens de l’exercice.
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